Turmel: Jesus was a rebel

Discussion about the New Testament, apocrypha, gnostics, church fathers, Christian origins, historical Jesus or otherwise, etc.
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Giuseppe
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Turmel: Jesus was a rebel

Post by Giuseppe »

It is intriguing the fact that Turmel wrote the following words in a time when he was in full knowledge of the best mythicist case (see the mention of Couchoud's book in note 1):

LE PROGRAME DE JÉSUS

C'est à cette phalange qu'appartient Jésus. Lui aussi essaya d'arracher son pays au joug de la puissance romaine et de restaurer l'ancien royaume de David. Lui aussi prêcha la rédemption, la délivrance. Naturellement son entreprise révolutionnaire lui coûta la vie. Arrêté par les légionnaires romains, il expira sur une croix. Mais, lui mort, son rêve survécut. Quelques partisans enthousiastes crurent qu'il allait revenir et réparer son échec par une victoire décisive. Ils le crurent et le firent croire. Tant la puissance romaine était alors abhorrée ! Tant aussi on était fasciné par le souvenir prestigieux du royaume de David !

Jésus a été un agitateur nationaliste. Comment le savons-nous ? Quand on veut avoir quelques renseignements sur les origines du christianisme, la première pensée qui se présente à l'esprit est d'interroger Josèphe. Mais le livre de Josèphe ne nous a été transmis que par des chrétiens, qui ne se sont pas interdit d'y introduire des interpolations apologétiques. La notice édifiante qu'on y lit aujourd'hui (Antiquités 18, 3, 3) émane d'une main chrétienne qui l'y a introduite au cours du III° siècle. [1] N'ayant rien à tirer de Josèphe, nous sommes réduits à consulter les évangiles, Paul et les premiers Pères. Mais les récits des synoptiques tombent presque toujours en poussière dès qu'on y touche. L'évangile de saint Jean est une oeuvre artificielle et composite. Paul ne nous fournit à peu près aucun renseignement sur le personnage dont il s'est constitué l'apôtre. Les premiers Pères sont des témoins bien éloignés. Dans ces conditions comment savoir ce qu'a été l'agitation créé par Jésus ? Comment reconstituer un programme sur lequel nous ne sommes renseignés que par des textes bourrés de légendes et de spéculations philosophiques ?

L'oeuvre est certainement malaisée. Pourtant ne nous hâtons pas de la déclarer impossible. Dans l'écorce terrestre le terrain primitif, ordinairement enseveli sous la couche épaisse des formations sédimentaires, émerge ça et là à la surface et s'étale à nos yeux. Comme les roches primitives de la terre, le programme de Jésus a été recouvert par le dépôt des légendes et des théories philosophiques. Voyons si le manteau artificiel qui le cache a accompli jusqu'au bout son oeuvre d'étouffement, s'il n'a pas, ici ou là, quelque déchirure nous permettant d'entrevoir la réalité masquée ailleurs par le mensonge.

Dans Luc 23, 2 les Juifs disent à Pilate en lui amenant Jésus:

Nous avons trouvé cet homme excitant notre nation à la révolte, empêchant de payer le tribut à César et se disant lui-même roi.

Pilate demande à Jésus s'il est roi des Juifs. Et la réponse qu'il obtient est celle-ci:

Tu le dis.

dont le sens est manifestement: «Oui, je le suis». puis, comme Pilate essaye de sauver Jésus, les Juifs insistent en disant:

Il soulève le peuple.

Quand Jésus est attaché à la croix, les soldats lui crient ironiquement:

Si tu es le roi des Juifs sauve-toi toi-même.

Et l'inscription fixée sur la croix est:

Celui-ci est le roi des Juifs.

Ces renseignements (sauf la prétendue tentative de Pilate pour sauver Jésus) n'ont pu être inventés par la légende qui s'est, au contraire, acharnée à les effacer ou là les défigurer. [2] Avec eux, c'est la réalité qui fait une apparition fugitive, tout comme en hiver on voit parfois, au milieu d'un brouillard intense, un rayon de soleil briller un instant, puis disparaître. Jésus a essayé de soulever le peuple juif contre les Romains, il a rêvé de rétablir le royaume de David. Son programme, identique à celui de Judas de Gamala, a été le programme d'un nationaliste exalté qui travaille à l'affranchissement de son pays.

Ce fait maintenant acquis nous donne la clef de plusieurs textes évangéliques.

Marc 1, 24 et Luc 4, 34 racontent que, dans la synagogue de Capharnaüm, un possédé entendant Jésus parler lui dit:

Tu es venu nous perdre.

Cette parole est recouverte aujourd'hui d'une gangue qui la rend méconnaissable. Mais séparons-la de son enveloppe; elle signifie: «Tu vas nous faire écraser par les légions romaines; tu vas causer notre perte». Ainsi comprise, elle est historique et elle a dû être, prononcée non seulement dans la synagogue de Capharnaüm mais ailleurs. Des Juifs se sont rencontrés çà et là, qui ont vu le danger de la campagne menée par Jésus et qui ont travaillé à l'écarter.

De même, tout n'est pas inventé dans la scène racontée par Marc 10, 35 qui nous montre Jacques et Jean demandant à Jésus de les placer à ses côtés quand il sera dans la gloire. Et cette autre scène dans laquelle, au dire de Luc 22, 24, les disciples se querellent à qui aura le premier rang, est, elle aussi, du domaine de la réalité. Les jeunes villageois qui se sont mis à la suite de Jésus, ont été séduits par les perspectives merveilleuses que le maître a fait miroiter devant eux. Pleins de confiance dans le succès de son entreprise, ils ont ouvert leurs âmes à l'ambition qui a amené avec elle son cortège ordinaire de rivalités et de querelles. L'attitude que nos textes, dans ces deux occasions, prêtent à Jésus est ficitve; celle des disciples ne l'est pas.



[1] Schuerer, Geschichte des Jüdischen Volkes, 1°, 544; P. Couchoud, Le mystère de Jésus, p. 20-25. Quant aux textes slaves découverts en 1906 par Berends, voir les dissertations de P. Couchoud, Les textes relatifs à Jésus dans la version slave de Josèphe (Revue de l'Hist. des Rel. 1926) et de S. Reinach, Jean-Baptiste et Jésus suivant Josèphe.

[2] Je ne m'occupe que de la substance des textes et non des détails. Dans 23, 2, le mot «roi» est précédé du mot «christ» qui n'est est que le commentaire et que j'ai supprimé.

(Joseph Turmel, Histoire des dogmes, tome I, p. 307-309)
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