Nous ne saurons jamais toute la vérité à ce sujet; mais, l'essentiel, c'est qu'il n'y eut pas de rapport officiel alors qu'il devait y eu avoir un; la conclusion qui s'impose n'est assurément pas favorable au caractère historique de la Passion.
Cette conclusion, qui n'est pas nouvelle (elle fut déjà mise en avant, mais avec des arguments médiocres, au XVIII° siècle), peut s'appuyer encore sur plusieurs considérations d'inégale valeur, qui doivent être toutes sérieusement examinées: [1]
1° Le silence des écrivains contemporains ou postérieurs de peu d'années, Philon, Josèphe, Juste de Tibériade. Le passage de Tacite, même s'il n'a pas été retouché, ne prouve rien, vu sa date tardive; à cette époque, la légende chrétienne était déjà presque entièrement constituée;
2° Les traits évidemment mythiques du récit de la Passion dont il a été question dans le premier volume de cet ouvrage (t. 1, p. 332-341);
3° La grande ancienneté de l'opinion des Docètes (voir plus haut, t. II, p. VI);
4° Une assertion fortement motivée de Reuss, dont on connaît la science et la prudence: le récit de la Passion manquait à la forme primitive de l'Évangile de Marc; [3]
5° L'histoire de la Transfiguration, qui se lit dans les trois synoptiques. [4] Je me demande depuis longtemps s'il n'y a pas là une première conclusion de l'histoire du Messie: le Messie en gloire monte au ciel en compagnie d'Elie et de Moïse. Quand le récit évangélique comporta celui de la Passion (sous l'influence des prophéties, des psaumes et d'un facteur très important qui nous échappe), la fin glorieuse ne fut pas éliminée, mais resta à titre d'épisode. Je sollicite, sur cette hypothèse, l'avis de mes doctes maîtres, les théologiens;
6° L'argument que j'ai fait valoir en 1904, tiré de la prédiction de la crucifixion au verset 17 du Psaume XXII. [1] Cet argument n'a pas été réfuté par M. Jean Révilie, qui s'y est pourtant loyalement essayé; voici la réponse que je lui ai faite:
Cette conclusion, qui n'est pas nouvelle (elle fut déjà mise en avant, mais avec des arguments médiocres, au XVIII° siècle), peut s'appuyer encore sur plusieurs considérations d'inégale valeur, qui doivent être toutes sérieusement examinées: [1]
1° Le silence des écrivains contemporains ou postérieurs de peu d'années, Philon, Josèphe, Juste de Tibériade. Le passage de Tacite, même s'il n'a pas été retouché, ne prouve rien, vu sa date tardive; à cette époque, la légende chrétienne était déjà presque entièrement constituée;
2° Les traits évidemment mythiques du récit de la Passion dont il a été question dans le premier volume de cet ouvrage (t. 1, p. 332-341);
3° La grande ancienneté de l'opinion des Docètes (voir plus haut, t. II, p. VI);
4° Une assertion fortement motivée de Reuss, dont on connaît la science et la prudence: le récit de la Passion manquait à la forme primitive de l'Évangile de Marc; [3]
5° L'histoire de la Transfiguration, qui se lit dans les trois synoptiques. [4] Je me demande depuis longtemps s'il n'y a pas là une première conclusion de l'histoire du Messie: le Messie en gloire monte au ciel en compagnie d'Elie et de Moïse. Quand le récit évangélique comporta celui de la Passion (sous l'influence des prophéties, des psaumes et d'un facteur très important qui nous échappe), la fin glorieuse ne fut pas éliminée, mais resta à titre d'épisode. Je sollicite, sur cette hypothèse, l'avis de mes doctes maîtres, les théologiens;
6° L'argument que j'ai fait valoir en 1904, tiré de la prédiction de la crucifixion au verset 17 du Psaume XXII. [1] Cet argument n'a pas été réfuté par M. Jean Révilie, qui s'y est pourtant loyalement essayé; voici la réponse que je lui ai faite:
Notes 1-4:
1. Ou eu trouvera d'autres, quelques-unes fort graves, dans l'important ouvrage d'un mathématicien américain: W. Benj. Smith, Der vorchristliche Jésus, Giessen, 1906. En revanche, il faut se méfier du livre de John M. Robertson, Pagan Christs (Londres, 1903), où la part faite à la fantaisie est vraiment trop forte.
2. Je ne crois pas à l'authenticite meme partielle du texte de Joséphe sur Jésus; il y a là seulement une double couche d'interpolations, inégalement adroites.
3. Reuss, Les Evangiles synoptiques, p. 82: «Il n'y a pas à hésiter, nous sommes amené à reconnaître un fait singulier, nouveau, inouï, un fait que personne n'a entrevu encore: c'est que l'Evangile de Marc, tel que Luc le possédait, ne contenait pas la Passion».
4. Matth., XVII, 1; Marc, IX, 2; Luc, IX.
2. Je ne crois pas à l'authenticite meme partielle du texte de Joséphe sur Jésus; il y a là seulement une double couche d'interpolations, inégalement adroites.
3. Reuss, Les Evangiles synoptiques, p. 82: «Il n'y a pas à hésiter, nous sommes amené à reconnaître un fait singulier, nouveau, inouï, un fait que personne n'a entrevu encore: c'est que l'Evangile de Marc, tel que Luc le possédait, ne contenait pas la Passion».
4. Matth., XVII, 1; Marc, IX, 2; Luc, IX.
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